Culture / Gastronomie / Japon / Photography

四季 Shiki

En ce 1er Avril, voilà, non pas un poisson, mais pour moi une année depuis que je suis arrivé à Tokyo. Et il y a un air de « nouvel an » qui flotte. En cette occasion, je vous propose une petite leçon de Japonais sur un élément extrêmement important pour la culture japonaise : les 4 saisons, 四季 Shiki .

春夏秋冬, shunkashūtō, printemps été automne hiver.

La vie tourne autour de ces 4 saisons, succession de périodes au climat très distinct, au cours desquels la nature change drastiquement, mettant à disposition un attirail différent d’ingrédients et de couleurs. Le tout est un cycle ininterrompu et surtout, qui se répètera à coup sûr. Pour accompagner cette valse interminable, il y a souvent des produits en édition limitée dans le temps, que ce soit les Calpis Mango pour l’été, chocolats de l’hiver ou les cafés à la fleur de cerisier chez Starbucks au printemps, les éditions limitées à la saison sont foison. Par contre, les saisons sont considérées comme tellement uniques qu’il est rare de les voir regroupées, même pour des collections automne-hiver dans le secteur de la mode. Ça n’aurait aucun sens.

Vous pouvez remarquer que shunkashūtō commence par le printemps, 春 (haru).

C’est au printemps que tout commence. De la rentrée scolaire à l’annonce des résultats économiques annuels, l’année au Japon est cadrée pour commencer au printemps, plus précisément en Avril, pour aller avec la période où les cerisiers sont en fleur dans tout le pays. Ou tout du moins, selon la tradition, à Kyōto. Cette floraison des cerisiers est probablement l’évènement le plus attendu. Alors que le printemps est la saison durant laquelle la vie renait, c’est le côté éphémère de la floraison qui le rend si important. Au total, les arbres ne montrent leurs fleurs que deux à trois semaines tout au plus, la période variant sensiblement selon la latitude (mi-février vers Okinawa, fin Avril dans les régions nordiques de Hokkaido). Le rose et blanc des cerisiers fait ensuite place au classique vert des plantes à leur effervescence. Le printemps est l’occasion de faire des 花見 Hanami. Tout le monde se retrouve dans des parcs, accompagné de quelques canettes de bière ou de saké pour pique-niquer sous les cerisiers, et admirer les fleurs.

_DSC2477

Puis, après le printemps, vient l’été, 夏 (natsu).

Mais pas si vite. Avant ça, la saison des pluies. 梅雨 (tsuyu), qui prépare le terrain de mi-juin à mi-juillet. Plutôt qu’une vraie saison, il s’agit d’une période de transition, un mois de pluies, légères mais quasi-incessantes, qui fait monter les taux d’humidité à des taux critiques en même temps que les températures. Ce ne sont pas des pluies impressionnantes en soi, ça ne cause pas de catastrophes ou d’inondations, donc ce serait faux de l’appeler mousson comme ce qui sévit dans les pays du sud-ouest de l’Asie. Il s’agit juste d’un temps pourri, qui ne fait qu’ennuyer, et qui, à la longue, peut impacter le moral. Ça donne pas envie de sortir.

20150622_DSC4399

Ce n’est qu’après qu’on peut enfin voir l’été, le vrai.

L’été est chaud et humide. Évidemment, les pluies ont aidé à faire augmenter le taux d’humidité. Et l’été, c’est chaud partout. Donc on sue facilement. Qui plus est, le passage par la saison des pluies ne garantit pas l’absence de pluie durant le cœur de l’été, mais au lieu de se traduire par une légère pluie quotidienne; ce sont des violents orages qui viennent ponctuer votre canicule tropicale. Pour moi, en tant qu’étudiant, je peux encore profiter de vacances d’été, mais ce n’est même pas le cas pour les Japonais dans la vie active. Ce qui n’aide pas à leur faire apprécier la saison. Pour contrer les fortes chaleurs, tous les bâtiments sont dotés de climatisation. Seulement, en particulier depuis Fukushima et la crise énergétique qui a suivi la fermeture de nombreuses centrales, il est demandé de ne pas les mettre en-dessous de 28°, ce qui, n’importe qui pourra l’admettre, est quand même chaud. Pour ceux qui travaillent quand même dans ces conditions, la mode du « cool biz » vient en renfort : des costards plus aérés, et souvent même portés sans veste. Voilà comment les japonais survivent.

Pour ceux qui ont un peu plus de temps libre, c’est aussi la saison où il y a le plus de 祭 (matsuri). Ce sont des festivals traditionnels, qui se font en général en l’honneur d’un dieu dans le coin, où une de ses relique est souvent transportée dans un 神輿 mikoshi, tour qui pèse des tonnes, portée par 50 à bout de bras et de forces. Un matsuri est surtout l’occasion de tester plein de snacks en toute sortes, allant du yakisoba aux poissons séchés. Les températures confortables aidant, beaucoup se font jusqu’à la nuit pour faire briller lampions et lanternes. Si ce ne sont pas des feux d’artifices, à admirer en yukata sous le cri des cigales.

_DSC4772

Début Octobre, et l’automne 秋 (aki) pointe le bout de son nez. Les températures reviennent à un niveau vivable, qui contraste avec la chaleur de l’été. L’automne n’est pas tant synonymes de pluies comme avec le climat continental, même s’il y a quelques pluies occasionnelles, elle ne sont pas aussi déprimantes que lors de la saison des pluies, ou violentes comme les orages estivaux.  En bref, c’est cool. Les feuilles rougissent et lentement transforment ce pays luxuriant en patchwork de couleurs chatoyantes. C’est le moment de gloire pour les érables, presque aussi fréquents que les cerisiers, sauf qu’ils pourront pavaner avec leurs feuilles pendant bien plus longtemps. C’est la période où de nombreux fruits arrivent à maturation, mais également des champignons dont les japonais sont friands : shiitake, shimeji, matsutake ou shimokoshi

_DSC7974

Finalement, c’est le tour de l’hiver, 冬 (fuyu).

Les régions du nord du Japon sont enneigées dès Décembre, et ne laissent voir le sol qu’au printemps, mais pour l’essentiel du pays qui ne se trouve pas aux même latitudes que la Sibérie, les jours de neige se comptent sur les doigts de la main. Ce n’en est pas moins l’occasion pour apprécier le monde devenu blanc, contrastant avec les arbres dépourvus de tout feuillage. L’hiver est surtout l’occasion de faire des nabe, ou shabu-shabu, ou toute sorte de plat chaud, à déguster confortablement installé dans un kotatsu. Même en cette saison, il n’est pas rare de voir des filles braver le froid en jupe, accolées au bras de leur petit ami, priant pour qu’il lui passe son blouson sur les épaules. Les rues s’illuminent pour les fêtes, et ceux qui ont de quoi se réchauffer dans la nuit froide peuvent admirer leur souffle se transformer en buée, entre deux joues rosées. Entre Noël en Décembre et la St Valentin en février, les occasions ne manquent pas.

_DSC1484

Lentement, quelques bourgeons font leur apparition. Et ainsi, la nature se prépare à repartir pour le cycle suivant.

Leave a Reply

Your email address will not be published.